un rapport Igac-IGF s'attaque aux politiques tarifaires

Posted by Lynna Burgamy on Tuesday, June 25, 2024


Le ministère rend public un rapport sur "L'Evaluation de la politique de développement des ressources propres des organismes culturels de l'Etat", rédigé conjointement par l'Inspection générale des finances (IGF) et l'Inspection générale des affaires culturelles (Igac). Si le rapport vise les établissements de l'Etat, ses constats et ses préconisations intéressent tout autant les collectivités territoriales, notamment sur les questions tarifaires.
La date de publication - mars 2015 - ne doit sans doute rien au hasard : Le Louvre s'apprête en effet à faire passer, le 1er juillet, son billet d'entrée de 12 à 15 euros, soit une hausse de 25%. Et cette augmentation succède à d'autres - certes de moindre ampleur - au cours des derniers mois, à Orsay, Beaubourg...

Les ressources en hausse... mais les dépenses aussi

Les conclusions de la mission IGF-Igac recoupent assez largement celles du rapport d'information sur les ressources des musées, présenté, il y a un an, par le sénateur (Les Républicains) de l'Aube, Yann Gaillard (voir notre article ci-contre du 28 juillet 2014).
L'étude porte sur un échantillon de 36 établissements, relevant principalement de la catégorie "musée et patrimoine" (Louvre, Orsay, Quai Branly, Beaubourg, Picasso, Versailles, Fontainebleau, Ecouen...), mais comprenant aussi des lieux de spectacle vivant (Cité de la Musique, Opéra, Opéra comique, Comédie-Française, Théâtre national de Strasbourg...), des espaces d'expositions (Palais de Tokyo, Grand Palais...), ainsi que des institutions spécifiques comme la BnF, l'INA ou la Grande Halle de La Villette.
Le premier enseignement peut sembler paradoxal. Entre 2004 et 2013, les ressources propres de ces 36 établissements ont augmenté de 54,1% à périmètre constant, soit une hausse annuelle de 4,9%. Mais, dans le même temps, les charges de fonctionnement progressaient de 40,5%, soit 3,9% par an. Au final, "le taux de ressources propres de fonctionnement" (TRPF) des organismes culturels de l'Etat n'a que modérément progressé entre 2004 et 2013 en passant de 37,5% à 40,7% pour l'ensemble du champ [...]". Cette progression d'ensemble recouvre toutefois des évolutions très variables, les taux les plus élevés concernant les catégories "musées et patrimoine" et "organisateurs d'expositions".

Le poids de la billetterie

Autre enseignement : en 2012-2013, la billetterie représente 44,5% des recettes propres, suivie par la valorisation du domaine (14,8%), les produits dérivés (13,9%), le mécénat/partenariat (12,8%) et la valorisation des collections et des productions (7,4%).
Du côté de la billetterie, le prix moyen pondéré du billet plein tarif affiche une hausse de 41,5% sur la période 2004-2013, soit 21,4% au-delà de l'inflation. Mais la progression de cette ressource est pour partie obérée par "des politiques de gratuité et de tarification réduite liées aux objectifs de démocratisation culturelle". Si on prend en compte ces éléments, la progression moyenne du prix du billet sur la période est de 28,4%, soit 10,1% au-delà de l'inflation.
Du côté des autres recettes, un focus sur neuf établissements disposant d'une comptabilité analytique montre que seules trois activités contribuent systématiquement à l'équilibre financier des établissements. Il s'agit en l'occurrence de la location d'espaces, des redevances de concessions et du mécénat (sous réserve de la dépense fiscale assumée par l'Etat). En revanche, les autres activités annexes - gestion d'un auditorium, expositions itinérantes, gestion en direct d'une boutique, éditions, ingénierie culturelle, activité numérique... - présentent le plus souvent un résultat déficitaire.

Deux axes majeurs d'amélioration

A partir de ce constat, le rapport préconise de développer les ressources propres selon deux "axes majeurs" : d'une part, en améliorant le rendement de celles offrant le meilleur potentiel financier ; d'autre part, en rationalisant, voire en repensant l'opportunité de certaines activités à l'équilibre financier fragile.
Sur la billetterie - qui offrirait les possibilités les plus intéressantes (et les plus faciles) -, le rapport propose trois mesures. La première consiste à "optimiser" les politiques tarifaires par une adaptation plus fine aux capacités de paiement des différentes catégories de publics. Les auteurs estiment en effet qu'"il subsiste des marges de progression des tarifs, tout en étant attentif aux effets de seuil". Ils relèvent également que les dispositifs de gratuité sont plus nombreux en France qu'à l'étranger et que des progrès restent à accomplir dans la modulation des tarifs et des amplitudes horaires en fonction de la saison.

Des réserves sur le mécénat... qui n'est pas gratuit

Présence de l'IGF oblige, la mission est réservée sur le mécénat, qui "constitue une ressource propre d'une nature particulière en cela qu'elle est partiellement financée par la dépense fiscale, qu'elle est susceptible de fragiliser". Le rapport formule également des préconisations sur les autres ressources propres, mais insiste sur la nécessité de "réinterroger" certaines d'entre elles à l'équilibre fragile. C'est notamment le cas de la gestion d'auditoriums et de l'offre de spectacle vivant dans les établissements patrimoniaux.
En conclusion du rapport, les préconisations sont regroupées en trois scénarios, allant du court terme (gisements les plus rentables ou les plus accessibles en matière de développement des ressources nettes) au long terme (recettes reposant sur une évolution de certains modes de fonctionnement).
Dans son communiqué du 25 juin 2015 saluant la remise du rapport, la ministre de la Culture n'a pas tout à fait la même vision que l'IGF et Bercy sur le mécénat. Fleur Pellerin y souligne en effet "l'apport essentiel des relations nouées entre les établissements culturels et leurs mécènes, notamment lorsqu'elles s'inscrivent dans la durée"...
 

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